Le péril des parents hélicoptères

  • Le cas hélicoptère : attention au coup de pale.

J’ai entendu ce terme pour la première fois dans la bouche d’une amie à la rentrée. Nous discutions de son travail au sein d’une grande entreprise américaine. Elle me racontait qu’elle avait beaucoup de mal avec une nouvelle recrue, un petit jeune, encore un coup de cette illustre génération Y.

Dans son entreprise, l’incompréhension générale et mutuelle est telle que des formations sont proposées aux cadres pour apprendre à gérer, à apprivoiser et à comprendre LE jeune !

Celui qui n’est pas autonome, qui ne prend pas de décision, qui n’a pas d’ambition, pas de respect, qui n’accepte pas la critique, celui qui travaille à l’heure, et qui étrangement se trouve supérieur.

Mais qui doit-on blâmer ? Le jeune adulte ou celui qui l’a éduqué ? Le nom du coupable est ressorti : tout ça, c’est la faute du parent hélicoptère.

Le parent hélicoptère est une appellation venue d’Amérique du nord. Elle fait référence à ces parents qui « planent » en permanence au-dessus de leur enfant. Comme un hélicoptère stationne au-dessus d’une zone définie.

  • La mauvaise éducation américaine

C’est aux États-Unis* qu’a été mise en lumière cette sur-implication des parents dans la vie de leur enfant.
On parle d’hyper parenting, lorsqu’un père et une mère prennent des décisions à la place de l’enfant, interviennent dans ses conflits et résolvent ses problèmes.
« Si votre père ou votre mère ont déjà contacté un de vos professeurs, sont intervenus dans un problème avec votre colocataire ou ont postulé à un job à votre place, il y a de fortes chances pour que ce soient des parents hélicoptères. »

La société serait coupable de cette dérive éducative. Elle, qui voudrait que l’on soit pour nos enfants, ami plutôt que guide. Elle, si compétitive qu’elle forcerait les parents à s’impliquer dans la réussite de leur fils ou fille.
Ce comportement empêche l’enfant de passer à l’âge adulte. Il crée des êtres incapables d’effectuer des tâches par eux-mêmes, sans surveillance ni aide. Des personnes qui se voient dans l’impossibilité de gérer les conflits et de penser par elles-mêmes.

Le résultat est là : le jeune adulte s’implique moins, il décroche, il hésite. Il déprime.

  • La revanche de la Tiger mom

Amy Chua est THE tiger mom. Chinoise, mariée à un américain, elle est maman de deux filles. En 2011, Amy publie son livre Battle Hymn of the Tiger Mother, dans le but de réformer l’éducation américaine à la dérive.
Pour cela, page après page elle prône les vertus d’une éducation très rigide fondée sur l’exigence et la discipline.
La tiger mom se dit notamment outrée par ces parents persuadés d’avoir enfanté un génie et qui osent se plaindre au professeur qui penserait le contraire.
« Quand Sophia avait 8 ans, j’étais 80% parent et 20% amie. Maintenant, je suis 80% amie et 20% parent, explique-t-elle. Il faut être sévère avec les enfants de 5 à 11 ans. Mais après, c’est peine perdue, il est déjà trop tard. Le sens de la discipline est là, ou il ne l’est pas. »
L’introduction du livre d’Amy Chua est symptomatique : « Voilà ce que mes filles Sophia et Louisa n’ont jamais été autorisées à faire :
1. Dormir chez une copine.
2. Passer un après-midi chez une copine.
3. Participer à un spectacle de l’école.
4. Se plaindre de ne pas pouvoir participer à un spectacle de l’école. »

Le ton est donné, le tollé général ! Amy Chua pense même être devenue « la mère la plus détestée de la terre. » La formation à l’excellence comme elle peut être pratiquée en Chine pêche par excès inverse. Les études montrent qu’elle engendre là aussi des faiblesses psychologiques.

C’est la question que l’on est en droit de se poser en se penchant sur ses écrits. « Ce n’est pas en imposant plus de règles qu’on assure le succès de l’enfant. L’excès de règles et la pression conduisent à l’anxiété. Ils empêchent le développement d’une pensée critique et l’acquisition de connaissances profondes, essentiels pour le futur. »

Cette grande pédagogue pense que chaque enfant est unique. Qu’il a sa personnalité propre, son rythme de vie, ses qualités et ses difficultés éventuelles.

Elle ajoute qu’il est primordial de conserver la spontanéité de l’enfant, et de l’éloigner de tout ce qui pourrait l’empêcher de s’épanouir.
Celui qui éduque doit connaître chaque enfant et faire preuve d’attention et de respect.

Ainsi il serait judicieux que les parents hélicoptères atterrissent de temps en temps, coupent le moteur  pour mieux entendre cette phrase de celle qui semble être la voix de la sagesse : « Libérez le potentiel de l’enfant et vous transformerez le monde avec lui. » 

Publié le Ecrit par Mathilde