On connaissait la journaliste sportive, sur les bords des terrains de rugby. On est devenu accro à son podcast La Matrescence, ce moment si particulier où une femme devient maman de tout son corps. Et on a appris qu’elle venait de terminer une formation de yoga pré-natal et post-natal. L’occasion était trop belle, au moins autant que son message adressé aux jeunes mamans (prenez TOUT votre temps). Rencontre avec Clémentine Sarlat.
Le sport et toi, c’est une longue histoire. Comment as-tu découvert le yoga ?
C’était il y a 13 ans. Je suis partie vivre aux États-Unis, à Minneapolis, et ma famille américaine pratiquait le yoga. Je n’en avais jamais entendu parler. Au début, j’ai détesté ! J’ai eu tellement mal aux bras alors que j’étais sportive. En plus, les cours de yoga étaient en anglais, je ne comprenais pas tous les enchaînements…
Puis ma sœur américaine est devenue prof de yoga et j’ai commencé à pratiquer avec elle. J’étais incapable de parler jusqu’à 15 minutes après ses cours, moi qui suis si bavarde ! C’était tellement fort d’apprendre à respirer, à se concentrer sur soi-même.
À mon retour à Bordeaux, le yoga n’était pas encore développé en France alors je suivais des cours en vidéo sur Internet. Et je pratiquais à fond quand je retournais à Minneapolis une fois par an.
Quel a été le déclic pour te lancer dans une formation de yoga pré-natal et post-natal ?
Le déclic a vraiment eu lieu après ma première grossesse il y a 2 ans, pendant une période post-partum très difficile. J’ai ressenti beaucoup de solitude, l’impression de perdre celle que j’étais avant. J’avais repris le yoga ashtanga 2 mois après la naissance de ma fille et j’étais épuisée. Mon corps était encore trop fragile. J’avais besoin de faire du yoga mais je ne trouvais pas de cours adapté. Et en France, les bébés sont très peu acceptés en salle de sport. Je ne pouvais pas laisser ma fille car j’allaitais.
À ce moment, j’ai assisté à plein de conférences sur la maternité organisées par des assistantes périnatales, des doulas. Elles étaient toutes formées au yoga post-natal. Je venais de quitter mon travail à France Télévisions et j’ai eu envie de me former aussi. J’en avais besoin, sans savoir ce que j’en ferai après. J’ai suivi mon intuition.
Qu’as-tu appris pendant ta formation ?
J’ai choisi une formation, organisée par une sage-femme et une prof de yoga, où la spiritualité occupait une place importante. J’y ai découvert la notion de grossesse et d’accouchement physiologique. J’ai appris des choses sur mon propre accouchement – que j’avais été déclenchée sans le savoir par exemple. Et j’ai appris l’importance de se laisser du temps : il faut 9 mois pour faire, 9 mois pour défaire. Dans notre société, difficile de prendre ce temps.
J’ai donné beaucoup de cours pendant cette formation. Et j’ai compris à quel point il était important d’être avec d’autres mamans pendant la période post-partum. Être entourée, écoutée, avoir quelqu’un qui prend en compte ses émotions… C’est un moment tellement particulier dans la vie d’une femme, un moment que l’on a oublié d’honorer.
Qu’est-ce qui différencie le yoga prénatal des autres yogas ?
Ça n’a rien à voir ! En yoga prénatal, on fait tout pour préserver et soulager le périnée. On va faire 6-7 postures maximum, rarement debout, et on travaille avec beaucoup d’outils de support : des bolsters, des coussins… Si on a la possibilité de prendre des cours particuliers, c’est très intéressant pour bénéficier d’un accompagnement sur-mesure.
Beaucoup de femmes découvrent le yoga pendant une grossesse. Mais pour les élèves qui le pratiquaient déjà avant, il est parfois plus compliqué de passer à quelque chose de plus doux. C’est un bon moment pour apprendre à lâcher prise. Le yoga pré-natal, ce n’est pas du yoga plus doux. C’est un yoga à part.
Et le yoga post-natal ?
C’est un yoga où l’on réalise beaucoup d’exercices de méditation et de visualisation, et des exercices qui accompagnent la rééducation du périnée. Je recommande vraiment les cours collectifs. Si l’on est seule pendant son congé maternité, l’effet de groupe est très positif. D’ailleurs, le plus dur en cours de yoga post-natal, c’est d’éviter que tout le monde parle !
Qui peut pratiquer le yoga pré-natal et post-natal ?
Sauf contre-indication médicale ou risque d’accouchement prématuré, tout le monde peut pratiquer le yoga pré-natal. C’est une pratique bénéfique car on travaille pour ouvrir le bassin, pour mettre le bébé et sa maman dans les meilleures conditions pour l’accouchement. On écoute beaucoup les femmes pour adapter le cours à leurs besoins. Par exemple, le premier trimestre est un moment très fatigant. C’est le moment où la pratique doit être la plus douce possible.
Pour le yoga post-natal, il est essentiel d’avoir commencé la rééducation périnéale pour suivre un cours, et de laisser du temps à son corps.
Sport et grossesse, c’est compatible ?
Oui ! Si l’on était déjà sportive avant la grossesse, c’est plus facile de continuer à un rythme plus doux. La grossesse, c’est un moment où l’on peut découvrir d’autres disciplines : natation, Pilates, yoga pré-natal, yoga dans l’eau…
Pendant la grossesse, les grands droits et les transverses vont s’étirer sur une vingtaine de centimètres. C’est énorme ! Pour s’assurer que tout se remette en place après l’accouchement, il n’y a rien de mieux que la respiration. Surtout, oubliez les crunchs, les sauts. Ça exerce une pression monstrueuse sur le périnée. Pour le soutenir, il faut ramener tous les muscles vers l’intérieur. On peut visualiser une fleur de lotus au niveau du périnée, qui se ferme à l’inspiration et qui reste fermée à l’expiration.
En yoga pré- et post-natal, c’est le travail en interne qui fait toute la différence. On associe un peu trop souvent sport et performance : si on n’en sort pas tout rouge, on n’a rien fait. Cette croyance est aussi liée au fait que l’on connaisse très peu notre corps.
À partir de quand reprendre le sport après la naissance de son bébé ?
Juste après la naissance, on peut commencer par pratiquer la respiration ventrale, 10 minutes par jour. C’est du sport ! Marcher avec son bébé, c’est du sport aussi. Dans tous les cas, mieux vaut attendre la rééducation du périnée et le feu-vert de sa sage-femme.
Et je crois fortement à la tradition des 40 premiers jours pendant lesquels la maman se repose. Elle ne porte rien à part son bébé, elle reste tranquille. On les a oubliés en France et c’est important que l’on s’éduque sur ce moment. Je sais que la société n’est pas adaptée, je ne l’ai pas fait moi-même. Le mythe de la Wonder Woman nous a permis de nous battre pour plus d’égalité mais la maternité, c’est un moment où tout notre corps change, notre cerveau change. On ne peut pas faire comme si ce n’était rien.
Tu vas donner des cours ?
Oui car j’aime trop les femmes ! J’ai envie qu’elles se sentent bien et j’adore transmettre. Il faut juste que je trouve du temps pour le faire.
Photo : @clemsarlat