Elles accouchent dans quelques jours, dans quelques semaines. Ce jour sera magique, unique, inoubliable. Cette rencontre, elles l’attendent le coeur chargé d’amour. Mais aussi, le coeur un peu lourd. Parce que le Covid-19 s’est imposé dans nos vies, il impacte le projet de naissance de nos futures mamans et tout ce qu’elles avaient imaginé. Il impacte aussi la réalité d’un accouchement qui se fera dans des conditions inédites qui chaque jour se précisent, dans chaque maternité. Il impose aussi mille questions, des angoisses, des doutes. Chez émoi émoi, on pense fort à toutes ces femmes et bien sûr aux papas. On avait envie de partager les témoignages de futures mamans de notre team #lafamille. Parce que c’est important de ne pas se sentir seule. Parce qu’il est légitime de trouver cela injuste. Et parce que formuler ses questionnements, ses incertitudes mais aussi ses éclaircies, cela donne des forces. #youaregonnamakeit
Tifenn, 28 ans, enceinte de son premier enfant.
Cela fait 14 jours maintenant que nous sommes confinés. Au départ, ma maternité privée communiquait qu’elle n’accepterait pas les futures mamans contaminées par le Covid-19. Ce qui m’a évidemment mis un énorme stress car en cas de contamination juste avant mon accouchement, j’aurais été envoyée dans un hôpital que je ne connais pas, accompagnée par une équipe inconnue, forcément sous pression. Pas le plus rassurant pour moi. Quelques jours après, ma maternité nous a annoncé qu’ils acceptaient finalement les futures mamans infectées par le Covid-19 mais que les papas accéderont uniquement à la salle d’accouchement si ces derniers ne présentent pas de fièvre, ni de symptômes. Il devront ensuite partir après la naissance et revenir seulement à la sortie du bébé. Je m’étais faite à l’idée de n’avoir aucune visite de la famille mais être sans le papa c’est dur et très stressant à encaisser. Julien avait prévu de dormir les 5 jours avec moi à la maternité pour commencer à créer notre petit cocon à trois. Je sais que je vais devoir gérer seule les premiers jours du bébé (la nurserie de nuit sera aussi fermée). Et les premiers jours de ma toute nouvelle maternité. Ce qui me console ? Si tout se passe bien, je sais que je peux faire une demande de sortie anticipée. A quelques semaines de mon terme, je commence à me faire à l’idée que Julien sera seulement là pour l’accouchement mais pas les jours suivants. Mais si les mesures changent et qu’il ne peut plus être avec moi en salle d’accouchement ? Mille questions se posent à moi : Vais-je devoir accoucher seule ? Comment cela va se passer ? Vais-je devoir accoucher sans péridurale par manque d’anesthésistes ? Comment se passeront les premières nuits avec bébé ? Le plus inquiétant c’est qu’on ne peut pas se préparer mentalement à la situation car tout peut changer du jour au lendemain.
Et le papa ? Julien accuse le coup. C’est normal, il rêvait tellement de faire son premier peau à peau dès la naissance du bébé. C’est un futur papa très investi et savoir qu’il ne peut pas être là pour les premiers jours et même peut-être à la naissance de sa fille est très dur psychologiquement surtout pour un premier bébé. Il est inquiet car il ne sera pas là lors des premiers soins, les premiers jours, les premières explications du personnel soignant…Il se demande aussi comment il va créer ce lien instantanément en étant absent les 5 premiers jours. Va t-il vraiment réaliser et ne pas se retrouver face à une inconnue lors de cette rencontre ?
Adèle, 34 ans, maman de Nour.
Enceinte de son 2ème enfant.
« Il y a 3 ans, pour mon premier enfant, je focalisais mes pensées sur l’accouchement. A l’approche de la naissance de mon deuxième enfant, je me projette davantage dans l’après. Les jours qui suivront. Qui plus est dans le contexte du Covid-19, avec toutes les contraintes qui en découlent. Mon premier accouchement a été fondateur dans la construction de mon couple. On a vécu tout cela à deux avec le papa. Les jours à la maternité ont été comme un sas nécessaire… et magique. Ce sont des moments que l’on raconte aujourd’hui encore à notre fille. Dans le contexte actuel, ces instants cocon à la maternité, ces premières fois avec notre bébé, je les vivrai certainement seule. Et c’est ça qui m’interroge le plus. Ca peut paraître dérisoire mais pour vivre au mieux mon séjour à la maternité, je me focalise sur des boosteurs, ces petits shoot de plaisir (au top de ma liste : des Kinder maxi dans ma valise et un roman qui fait voyager (je cherche encore !)). J’ai par ailleurs beau me rattacher au rationnel, j’ai beau lire des articles sourcés, vérifiés, écouter les spécialistes, je ne sais pas ce qui peut ou va se passer et c’est aussi cette incertitude qui peut faire basculer de l’autre côté. J’invite au passage tout le monde à arrêter d’envoyer ces chaînes de fakes news qui viennent du cousin de la belle-soeur du directeur de l’institut bidule ! #vousvoyeznon?
Beaucoup de gens m’envoient leurs encouragements, leurs pensées et je les en remercie sincèrement. Je suis consciente qu’il faut avoir confiance et que nous ne sommes pas les plus « fragilisées » sur le papier mais en cette période inédite et avec tout ce que la fin d’une grossesse génère aussi en émotion, en temps normal, on reste forcément optimiste mais on a aussi le droit de se plaindre, d’être mal à certains moments. L’accouchement, le post-partum sont pour certaines physiquement très éprouvants en temps « normal », mais le vivre en se sentant plus seule et vulnérable… #doublepeine. Il faut pouvoir le dire. Je m’interroge enfin sur le retour à la maison : Dans quelles mesures suis-je certaine de protéger mon bébé du virus une fois de retour ? Dois-je laisser ma fille aînée à ma mère ou à ma belle-mère le temps de l’accouchement, au risque d’agrandir la chaîne de contamination et donc les risques ? Doit-on vivre chez mes parents si le confinement est toujours en cours ? En revanche, de savoir que le papa sera à la maison à notre retour, que nous serons tous les 4 potentiellement en confinement, cela ne m’inquiète pas du tout. En tant que chef d’entreprise, cela va m’obliger à rabattre les cartes, à ralentir nettement mon activité et à me concentrer sur les moments en famille, les échanges avec le bébé. Nous serons dans une bulle. La nôtre.
Et le papa ? Quand Basile a appris qu’il ne pourrait potentiellement pas rester avec nous à la maternité et peut-être pas assister à l’accouchement (à ce jour c’est possible mais il faut se préparer à toutes les éventualités), il m’a préservé. De sa tristesse et de ses craintes aussi.