C’est la semaine de l’allaitement. Alors on a souhaité remettre en avant ces témoignages de mamans rencontrées il y a 2 ans. Et on fait aussi un gros big up à celles qui ont fait le choix de ne pas allaiter ou qui n’ont pas pu le faire. Parce que c’est ça être une (super) maman. Faire comme on peut, comme on veut, avec toujours une énorme dose d’amour.
L’allaitement.
Un sujet magnifique, que nous tentons toujours d’aborder avec délicatesse sur émoi émoi magazine.
Parce qu’il déchaîne les passions.
Chaque femme a une relation toute personnelle avec lui. Amour ou désamour, ça ne regarde que nous. L’allaitement est une sorte de vocation, comme un appel. Certaines l’entendent et sont appelées, d’autres non.
Aujourd’hui, c’est l’allaitement long que j’aimerais évoquer ici. Je n’ai moi-même pas allaité mes enfants et je suis émerveillée de voir ces mères superbes trouver naturel et évident, ce geste qui, parfois, peut me gêner.
J’ai demandé à quatre femmes admirables de nous parler de leur allaitement. Sous forme de questions réponses, elles ont accepté de nous raconter la mise en place de leur allaitement et comment il s’est installé dans la durée.
Anne-Sophie, Eve, Florence et Ombeline allaitent encore, et alors ?
L’allaitement était une évidence depuis toujours pour toi ? Et l’allaitement long ?
Eve : « Non ce n’était pas du tout une évidence. Ma mère n’a pas allaité, ma sœur non plus, j’avais peu d’exemple autour de moi. Je crois que j’ai vraiment découvert ce que c’était avec mes amies qui ont des enfants plus grands que moi.
Pareil pour l’allaitement long, j’ai toujours cru que l’allaitement était lié à notre congé maternité, qu’on ne pouvait pas allaiter en travaillant. Petit à petit, à force de lire des expériences à droite et à gauche j’ai découvert qu’on pouvait très bien allaiter une seule fois par jour et pendant plusieurs années. »
Anne-Sophie : « Oui, absolument. J’ai toujours voulu connaitre et créer ce lien avec mes bébés, et je suis persuadée des bienfaits immenses de l’allaitement pour le bébé comme pour la maman. L’allaitement long en revanche, non, ça n’a pas toujours été une évidence. Je me rappelle, plus jeune, regarder avec stupéfaction les femmes qui allaitaient des bébés avec des dents ou pire, qui marchaient ! Alors qu’aujourd’hui je le fais.
J’ai allaité mes deux ainées un peu comme la plupart des jeunes mamans actives, entre 2 et 4 mois, puis j’ai cessé ou mixé avec le lait artificiel, lorsque j’ai repris le boulot. En fait, je ne m’étais pas trop posé de questions, la vie et la société me dictaient un peu ce type de comportement.
Pour ma 3ème en revanche, j’ai choisi de changer de vie et de métier, notamment pour profiter à plein temps de ce qui serait certainement ma dernière grossesse et toute petite enfance. La volonté d’allaiter longtemps est venue avec ce choix. J’en avais vraiment envie. J’ai pris le temps de regarder la composition des laits artificiels, et, en parallèle avec des choix d’alimentation bio, ça m’a fait froid dans le dos. Non, je n’avais pas envie, si la possibilité m’était donnée de faire autrement, de donner ça à mon bébé.
Cela dit, je n’imaginais pas que cela durerait autant, je m’étais dit « autour de neuf mois, un an… » Mais aujourd’hui, je ne sais quasiment plus comment arrêter. C’est devenu complètement naturel. Et je continue à être persuadée que même avec une alimentation diversifiée par ailleurs, c’est excellent pour elle et pour moi. »
Florence : « Oui, j’ai toujours voulu allaiter. J’ai allaité mes trois enfants avec plus ou moins de succès. Je connais l’allaitement long seulement avec Jude et c’est une évidence de continuer jusqu’à, je l’espère, un sevrage naturel. »
Ombeline : « Allaiter oui, dans mon entourage proche, je n’avais que de bons exemples. C’était la suite logique de l’accouchement, et ma maman ne m’en parlait qu’en bien. Cela m’a donné la confiance et la naïveté nécessaire pour ne pas plus réfléchir ! Je ne m’étais mis aucune pression et avait envisagé le biberon si l’allaitement ne fonctionnait pas. Pour l’allaitement long, je préfère allaitement non écourté ! Un grand NON, je pensais arrêter à six mois comme par magie. Mais comme beaucoup de choses lorsqu’on devient parent, on négocie ses principes. Je n’avais pas imaginé allaiter jusqu’à ses 19 mois. J’aurais trouvé ça bizarre ! »
Il s’est mis en place facilement ?
Florence : « Oui, je n’ai pas eu beaucoup de difficultés. Quand j’en ai eu, je me suis toute suite renseignée pour savoir ce que je devais faire, contrairement à mes deux premiers allaitements pour lesquels je manquais beaucoup d’informations et de soutien ! »
Anne-Sophie : « Oui, très facilement. C’est un peu surprenant la première fois, un peu ennuyeux, ces fuites, mais très vite, ça se normalise au rythme du bébé. C’est stupéfiant de voir comme le corps de la maman produit ce qu’il faut et quand il le faut. Il y a en revanche une chose dont on ne m’avait jamais parlé et que toutes les mamans allaitantes devraient savoir : lors des premières semaines, le bébé fait des pics de croissance, qui le poussent à boire quasiment tout le temps pendant 24/48h. Souvent la maman est désemparée, pense qu’elle n’a plus de lait, et complète avec le lait artificiel, ce qui n’a pour d’autre conséquence que de limiter sa production, alors que la fréquence des tétées est justement là pour la stimuler. »
Ombeline : « Oui, Blanche a su téter très naturellement dès sa naissance sans avoir à faire trop attention à sa position et à celle de sa bouche. Les quatre premiers jours je ne comprenais pas pourquoi mon bébé perdait du poids alors que Blanche tétait régulièrement. J’aurais aimé que les sages-femmes m’expliquent que tout était normal, que la mise en place prend du temps. J’ai connu une belle journée de pression, il fallait absolument que notre bébé tète pour reprendre 100g ! Tout rentre dans l’ordre avec la montée de lait. »
Raconte-moi l’histoire de ton allaitement.
Florence : « J’ai allaité mon premier bébé pendant deux mois, cela fut très compliqué, je n’avais pas beaucoup d’informations, j’étais seule à l’élever, je n’avais pas confiance en moi. Au premier obstacle j’ai très vite baissé les bras ! Pour mon deuxième enfant, mon allaitement a duré trois mois, mon médecin m’avait conseillé de passer au lait artificiel pour que Gabriel soit mieux rassasié et qu’il me réclame moins le sein. Pour Jude, je n’ai écouté personne, seulement moi ! Dès que j’avais un problème, je filais sur le site de la Leche league pour essayer de trouver des solutions et aujourd’hui je compte 20 mois d’allaitement ! »
Ombeline : « J’ai beaucoup de chance. Tout s’est toujours bien passé. Blanche tète à la demande. C’est un moment de câlin, de bien-être et même de franche rigolade. Bien que parfois je trouve l’allaitement fatiguant mais sûrement pas plus que de donner un biberon. Je ne crois pas être assez courageuse et organisée pour donner le biberon ! C’est une sacrée logistique ! Blanche a maintenant un peu plus de 19 mois et elle tête toujours. La semaine beaucoup moins car elle va à la crèche et le week-end un peu plus car on est ensemble. Elle s’endort le soir toujours au sein et c’est je l’avoue la seule chose que je changerais bien… Je n’ai jamais tiré mon lait, et donc je n’ai jamais passé une nuit sans ma fille. Aujourd’hui, je crois qu’elle arrêtera d’elle-même, je le sens. »
Sur ton compte instagram on trouve ce hashtag : #jallaiteencoreetalors, pourquoi ? Le regard des autres n’est pas toujours bienveillant ? Il faut changer les mentalités ?
Florence : « J’ai créé le #jallaiteencoreetalors suite à des réflexions et des regards passés mes 6 mois d’allaitement. J’avais envie de changer le regard de la société sur l’allaitement long et je souhaitais soutenir les femmes qui se sentent isolées, dépassées face à certaines remarques ou en difficultés avec leur allaitement. Pour leur dire qu’elles ne sont pas seules ! La société française a du mal avec l’allaitement long, certainement par manque de connaissances ! Les campagnes sur l’allaitement le préconisent jusqu’aux 6 mois de l’enfant. Malheureusement on parle rarement des bienfaits de l’allaitement après ces 6 mois. »
Eve : « Pour ma part, c’est pour rendre service aux autres mamans car j’ai eu beaucoup de question à ce propos. Il y a 8 ans pour mon ainé j’aurais aimé être mieux conseillée. Si j’avais vu ce hashtag chez d’autres mamans j’aurais peut-être continué mon allaitement. Je pense qu’il y a un peu de jugement aussi ? Alors c’est agréable de voir de jolies photos de ces moments-là, ça veut dire « tu vois c’est beau et précieux l’allaitement même à 16 mois » et aussi « j’assume quoiqu’on en dise ». »
Anne-sophie : « Je n’hésite pas à faire du prosélytisme (sans pour autant le reprocher à celles qui ne le font pas !) Mais oui, le regard, ou l’avis des autres n’est pas toujours bienveillant, même sans parler d’allaitement longue durée. L’allaitement est toujours responsable de tous les maux – « ton enfant dort mal la nuit ? C’est parce que tu l’allaites encore. Elle ne veut pas aller à la garderie, se séparer de toi ? C’est parce que tu l’allaites encore. » Tout est bon pour stigmatiser l’allaitement et vraiment je ne comprends pas pourquoi. Je ne juge pas celles qui n’allaitent pas, pourquoi me jugeraient-elles ? »
Ombeline : « C’est Florence du compte J’aurais pu m’appeler Marcel qui l’a créé. Et elle a bien fait ! Toutes ces photos de maman et de leur « grand » bébé sont magnifiques. Je l’aime beaucoup ce hashtag. Je me sens moins seule, moins isolée dans mon allaitement non écourté. Je ne sais pas si le regard des autres est malveillant. J’ai la chance sur Instagram d’avoir beaucoup de personnes gentilles et bienveillantes qui me suivent. Dans mon entourage, le fait d’allaiter « encore » Blanche, surprend, interroge, dérange, fait faire des mimiques bizarres ou même dire des choses étranges et c’est parfois agaçant. Je crois que la clef est de ne pas juger pour ne pas se sentir jugé. »
Quelques conseils : quand on a peur de se lancer dans l’allaitement ? quand on galère ? quand on voudrait arrêter ?
Anne-sophie : « C’est difficile de donner des conseils sur ce sujet. C’est très personnel. Cela dépend vraiment du ressenti de la maman, de celui du papa aussi. Parfois le corps ne veut pas. Je dirais qu’il faut vraiment faire comme on le sent. Quand on galère, il faut faire confiance. Tant que le bébé va bien, même s’il ne grossit pas beaucoup, il n’y a pas de raison d’arrêter, sauf si on en a envie. Comme beaucoup de choses dans la vie, c’est une question d’envie. Idem quand on veut s’arrêter. C’est quasiment comme quand on veut arrêter la cigarette : pour y arriver, il faut vraiment le vouloir. Sinon, c’est compliqué, pour la maman, pour le bébé. Je m’étais fixé début janvier, les 2 ans de ma fille, pour arrêter. Et elle ne m’a jamais demandé autant qu’en ce moment ! Alors je me dis à quoi bon la forcer au sevrage ? Tant que cela ne me pose pas de problème, je continue. Cela ne m’empêche plus de m’absenter plusieurs jours si c’est nécessaire. Ce sont des moments vraiment précieux, et qui parfois résolvent aussi bien des situations ! »
Florence : « Si je peux donner un conseil c’est de vous écouter, vous ferez toujours ce qui est le mieux pour vous et votre bébé ! Ne vous découragez pas. Fermez vos oreilles à certaines personnes de mauvaises paroles, et ayez confiance en vous ! Si vous avez un problème, je vous recommande le site de la Leche League et si vous avez besoin de parler, vous pouvez téléphoner à une conseillère en lactation, il y a une liste en fonction des régions sur le site. Pour celles qui veulent arrêter, je leur conseille de le faire progressivement si cela est possible bien sûr ! »
Eve : « Ne pas hésiter à demander conseil autour de soi, j’ai eu beaucoup de messages de mes abonnés sur Instagram, beaucoup m’ont redonné confiance en moi et l’envie de continuer. »
Les plus beaux moments de votre allaitement ?
Ombeline : « Le plus fort est surement celui de notre première nuit ensemble à la maternité. Blanche était dans mon lit pour la tété, j’avais si peur de l’écraser que je m’éloignais d’elle, de son côté, elle mettait toute son énergie à se hisser vers moi. J’ai compris à cet instant que j’étais une maman et qu’elle aurait besoin de moi pour toujours. »
Anne-Sophie : « A partir de 5/6 mois, quand il est bien mis en place, que les seins ne gonflent plus car il n’y a plus de montée de lait, quand ils ont retrouvé leur « taille normale », ça devient vraiment top. Les avantages sans les inconvénients. Puis quand le bébé grandit, il est capable de demander seul, et moi je suis aussi capable de lui dire que non, ce n’est pas le moment, et elle le comprend. Ca devient une vraie relation bilatérale. Ça crée un lien très fort. Et le papa n’a pas moins sa place dans l’histoire, juste parce qu’il ne donne pas de biberon ! Les plus beaux moments restent sans aucun doute les tétées du soir, ou la nuit, quand on est dans le calme, à moitié endormies, juste à deux. Celles du matin dans le lit aussi… J’aime l’allaitement parce que c’est simple et naturel, facile. Sans prise de tête. Doux. La vie comme j’en ai envie. »
Eve : « Notre meilleur moment c’est le matin avec mon bébé, car c’est notre premier contact de la journée, un moment au calme, rien qu’à nous avant la folle journée et le bruit que peuvent faire trois enfants ! Une façon de dire, bonjour, bonne journée mon bébé ! »
Florence : « Chaque moment de mon allaitement, c’est tellement magique ! »