Parce qu'être maman solo est un défi dans une société qui n'en prend pas toujours la mesure, le récit de Léa, maman séparée de trois enfants, est un témoignage précieux.
2 séparations, 3 amours
Je suis la maman de trois enfants. Mes deux filles Paz et Romy sont nées il y a 11 ans d'une première union. La séparation avec leur père fut nécessaire et salvatrice, mais la suite a été très difficile concernant la garde, les pensions, les accords en matière d'éducation et le cadre de vie de façon générale. Mon fils Maùro est né il y a 4 ans d'une histoire d'amour qui n'a pas résisté au post-partum et au confinement. Néanmoins, nous sommes en très bons termes avec son Papa, nous formons un couple parental très solide, toujours unis pour nos enfants. Il est très présent dès que nécessaire, ainsi que ma belle-famille qui est d’un réel soutien. Il a été un beau-père super pour mes filles et conserve toujours ce rôle aujourd'hui. Dès qu'elles en ressentent le besoin, nous organisons des moments ensemble.
Recomposer une famille
Quand j'ai rencontré le Papa de Maùro et que nous avons décidé de faire un enfant, mes filles avaient 5 ans. Autant l'arrivée d'un nouvel homme dans leur foyer ne leur a posé aucun problème, autant l'annonce d'un bébé qui viendrait rebattre les cartes de six années de vie avec moi a semé quelques pleurs le jour J. Elles sont depuis 4 ans des grandes sœurs très proches de leur petit frère, heureuses de grandir quotidiennement auprès de lui, et de former une fratrie lambda. Le mode de garde permet que chaque matin ils se lèvent et partent à l’école ensemble.
Rompre en restant mère
Lors de ma séparation avec le père de mes filles j’avais 28 ans, et elles avaient à peine 4 ans. J'étais déjà seule dans ma maternité et ma parentalité depuis leur naissance, cette séparation n’a engendré aucun changement d’organisation, de rythme et de quotidien pour moi. En ce qui concerne ma séparation avec le papa de mon fils, nous avons longtemps composé pour le bien de nos enfants, notre relation nous a permis de préserver notre famille et de construire au fil des semaines une nouvelle organisation en douceur.
Maman solo
J'ai honnêtement la chance d'avoir des enfants "faciles". Est-ce qu'ils le sont par nature ou est-ce qu'ils sentent quelque part que je n'ai pas l'espace pour trop de difficultés, peut-être, je ne le sais pas. Toujours est-il que je suis épargnée par les soucis de comportement, de santé, d'échec scolaire ou autre. Il y a des limites, un cadre qui est le mien, je suis patiente sur certaines choses et pour d’autres moins. J’ai la liberté de fixer mes propres règles, qui fonctionnent pour mon bien être et mon équilibre, sans devoir faire de compromis. Les joies de composer juste avec soi-même! Je n'ai pas de conflit sur l'éducation au quotidien. Avec mon fils, j'arrive à jouer les deux versants autorité/laxisme, good cop/bad cop mais je suis aussi attachée à ce qu'il y ait une autorité paternelle naturelle. Il m'arrive donc d’appeler son papa pour intervenir si j'en ai besoin. Il valide toujours mes choix et réciproquement. Quand cela est possible, préserver le couple parental est très précieux. Avec mes filles je porte de façon plus isolé leur éducation, mais mes parents ne sont jamais loin pour nous sauver et nous sortir de toutes les difficultés qui nous touchent.
Charge mentale
J'ai évidemment une charge mentale très importante mais je crois qu'elle est propre à tous les parents. Je travaille de la maison, l'intendance est donc plus fluide, et je sais que si une tâche n’est pas accomplie, je ne pourrais m’en faire le reproche qu’à moi même. En revanche, pour prévoir des événements pro ou perso, tout s'anticipe, il n'y a aucune place pour la spontanéité. Ce qui peut rendre les choses frustrantes. Cela me limite aussi dans mon évolution professionnelle, mais là aussi c’est un choix.
L’image du couple
Le CV "maman de 3 enfants de deux pères différents", je ne l'avais pas envisagé. J'ai d'ailleurs du mal à l'intégrer, mais la vie est pleine de surprises.
Les enfants le vivent bien car ils n’ont jamais vécu une fracture franche de la famille, ils peuvent aller chez l’un ou chez l’autre, appeler au besoin sans aucune limite. Ils ont des parents unis à leurs yeux. Au quotidien et à l'école, les enfants d’aujourd’hui sont confrontés à un monde si pluriel et des schémas multiples et non conventionnels que mes filles ne se sentent pas marginalisées. Elles vivent ce qu'il y a à vivre, elles savent que rien n'est figé dans le temps. Je mets un point d’honneur à les garder à distance de mes soucis quels qu'ils soient.
Il y a un vrai sujet sociétal à saisir sur la question des mères célibataires. Les mamans solos vivent dans une certaine précarité, on le sait. A 28 ans sans revenu, j’ai dû être nourrie et logée par mes parents pendant des mois. Obtenir sa pension alimentaire peut devenir un cauchemar sur Terre, financer les procédures est un gouffre. En début de mois, j'ai des charges récurrentes comme tout le monde, sauf que je ne sais jamais si je peux compter sur le versement de la pension. Les préjudices moraux, psychologiques et financiers sont colossaux. Nous devons faire face à de nombreuses injustices, et la société ne met rien en place pour nous aider. Pas plus tard qu’hier j’ai voulu créer une carte famille nombreuse, procédure qui n’a pu aboutir puisque je ne vis pas en couple malgré que je sois la Maman de 3 enfants.
