Pia, mother of Pénélope : « J’ai réalisé que notre société n’était pas adaptée aux enfants. »

Pia a donné naissance à Pénélope il y a 15 mois. Avec Kamel, ils forment un duo, comme parents et comme professeurs de yoga au sein de leur propre centre Yoga Etxea, sur la côte basque. Si Pia n’a fait aucune projection sur la mère qu’elle serait, elle s’est pris une claque en constatant dans quelle société elle allait construire sa parentalité. Elle nous livre ses réflexions de jeune maman avec simplicité et honnêteté. 

 

« Dans mon expérience, ce n’est pas l’arrivée d’un enfant qui est difficile, c’est la suite. »

“Pénélope est née la veille des grandes grèves, à Paris. Mes parents n’ont pas pu venir à Paris pour la rencontrer, nous vivions dans un petit appartement sans luminosité  au-dessus d’un bar…Cela faisait beaucoup (trop). Au-delà de ce contexte difficile, j’ai tout de suite réalisé à quel point notre société n’était pas adaptée à la vie de famille, aux enfants, à la parentalité. Dans mon expérience, ce n’est pas l’arrivée d’un enfant qui est difficile, c’est la suite. Dans une société anti-enfant qui n’est pas là pour nous rassurer ou nous envelopper, j’ai ressenti le besoin d’offrir un environnement plus doux. Je voulais que Pénélope marche ailleurs qu’à Paris. Un mois avant le premier confinement, nous sommes partis nous installer à Biarritz dans la maison d’enfance de ma maman et nous avons ouvert dans le village de Guéthary, avec mon compagnon, notre centre de yoga.

« Dans le bain de la maternité, on agit, on compose, on improvise mais on n’a pas l’espace pour prendre de la hauteur. »

« Durant ma grossesse, je ne me suis pas projetée sur la mère que j’allais être. Je crois d’ailleurs qu’il est impossible de s’en faire une idée car se pose une autre question dans l’équation de la maternité : “Quel enfant aura-t-on ?”. Ma fille était un poids plume à la naissance. Son début de vie a été intense car elle avait un sommeil plus compliqué, un désir de succion plus important et un besoin d’être nourrie physiologiquement plus fort qu’un enfant né à 4kg. Se joue alors un timing différent. Durant la grossesse, on prend le temps de se renseigner, de se préparer à l’arrivée de son enfant. Cela a donné lieu à des moments où je n’ai pas su la lire, par manque de clarté, de recul. Aujourd’hui Pénélope a 15 mois et je ne suis pas encore sur les rails. Sur la question si essentielle du sommeil par exemple, je m’investis pleinement au quotidien pour l’aider. Et pour trouver les clés, j’ai aussi compris que je devais demander de l’aide. Je l’ai fait pour le sommeil (auquel je me forme d’ailleurs) mais aussi pour l’alimentation de Pénélope. Quand des blocages surviennent et que tout devient trop intense, un professionnel a ses connaissances et cette hauteur qui désamorcent là où l’on s’embourbe.”

« Il y a une vraie scission entre ce que l’on sait et ce qui est jouable sur la durée. »

“Je trouve que la parole se libère sur la complexité et les contradictions de la vie de parents. En revanche, on ne dit peut-être pas assez qu’entre les informations que l’on absorbe et leur mise en pratique, il y a un gap. On parle du cododo, des bienfaits du maternage proximal,…On se met une pression sur ces sujets mais si tu te mets dans un moule qui n’est pas adapté à ton quotidien, à ta société, à ta vie, ça peut ne pas du tout fonctionner. Quelque chose qui marche dans une culture peut ne pas marcher dans la nôtre. Bref, il y a une vraie scission entre ce que l’on sait et ce qui est jouable sur la durée. Un jour quelqu’un m’a donné comme conseil de vivre l’instant présent avec ma fille.  Ca vaut si on parle des ces moments suspendus avec son bébé, ces moments doux d’amour fou,de progrès, de découvertes..mais quand l’instant présent est difficile, qu’il y a beaucoup de pleurs, des nuits compliquées, que c’est trop intense, on ne rêve que de sortir de cet instant présent et on se projette au suivant !”

Photo : @pialecannu immortalisée par Claire Vergne

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